Les croque-morts améliorés

L'habit de deuil jusqu'à présent
Ne se portait assidûment
Que chez l'personnel funéraire,
Les anciens croqu'-morts ordinaires.
Depuis qu'la vogue est au noirâtre*,
Dans les rues d' Saint-Germain-des-Prés,
Y a des croque-morts améliorés !

Il ne m'importe aucunement
Qu'on mêne mon enterrement
Avec des croqu'-mort ordinaires
On bien leurs nouveaux congénères.
Mais le bruit court que des emplâtres
Ont un' peur bleue d'être enterrés
Par des croque-morts améliorés !

Et c'est pourquoi j'ai fait ce chant
Qui va permettre aux braves gens
De distinguer les funéraires,
Les anciens croqu'-morts ordinaires.
Des galopins un peu folâtres
Qui se mettent en deuil exprès :
Les croque-morts améliorés !

Si le croqu'-mort s'en va sifflant
Les joyeux couplets à vingt francs,
C'est un honnête fonctionnaire,
C'est un croqu'-mort ordinaire.
Mais s'il écoute en idolâtre
Les disques des be-bop cassés,
C'est un croque-mort amélioré !

* Aux alentours des années 50, à Saint-Germain-des-Prés, la mode était aux tenues noires.